Le texte parfait au premier jet n’existe pas et cette règle est valable pour tous les écrivains.
« Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage : Polissez-le sans cesse et le repolissez ; Ajoutez quelquefois, et souvent effacez »
Boileau
La phase de réécriture c’est déjà une première victoire pour un écrivain, car il est venu à bout du premier jet de son histoire. Bien sûr, dans le vaste champ que représente le texte produit, les mots débordent comme des mottes de terre à l’état brut. Le travail à réaliser pour la seconde phase d’un projet de roman est encore considérable. C’est à ce stade que se joue l’avenir de l’histoire créée par l’écrivain.
Si pour certains auteurs il a fallu se faire violence pour parvenir à se libérer et oser improviser ou sortir d’eux-mêmes un premier jet très imparfait, qu’ils soient rassurés, tous les filtres d’autocritique et de contrôle peuvent être à présent réactivés. C’est même indispensable.
L’écrivain doit être indulgent pour écrire mais intraitable pour réécrire.
Prendre du recul vis-à-vis de son texte est nécessaire pour commencer à l’aborder avec un nouveau regard, critique. La façon la plus naturelle pour prendre du recul par rapport à son texte est de s’en détacher depuis les profondeurs. C’est le moment pour l’auteur de se lancer dans une nouvelle création qui va accaparer tout son esprit ou de s’accorder un break temporaire pour se vider la tête, partir en voyage, rompre avec le quotidien.
Prendre du recul est déjà une forme d’habitude dans le rituel d’écriture, en relisant la production de la veille, après une nuit de repos. Mais dans le cadre d’un premier jet complet, il est important de véritablement décrocher de son texte, au moins quelques jours ou quelques semaines.
C’est seulement en vous replongeant avec un regard un peu plus distant que vous pourrez repérer, surtout en lisant le texte d’une traite, les incohérences ou les dysfonctionnements majeurs. Le but de cette relecture à froid est de consolider l’histoire, son équilibre, le respect des grands actes dramatiques, le fonctionnement des personnages…
Le second regard sur le texte, après une relecture intégrale, permet de déterminer avec précision les lignes fortes de votre histoire. Celles qui nécessitent d’exister, d’être renforcées et libérées du superflu ou de tout ce qui en parasite la mise en lumière.
A ce stade, votre récit commence à prendre forme et les aspérités les plus disgracieuses sont élimées.
Une fois que la relecture du manuscrit et les premiers ajustements de l’histoire sont effectués par l’auteur, il est temps de passer à l’étape suivante, l’épreuve des lecteurs tests. Quelques lecteurs, bien spécifiques, vont pouvoir jouer leur rôle et partager leurs analyses et critiques pour préciser et améliorer le récit. Si les lecteurs en question ne sont ni des professionnels de l’édition ni des scénaristes, ils ne doivent pas être des amis ou des membres de la famille. Cette phase de relecture doit être le plus professionnelle possible, et libre de toutes remarques parasitées d’affects (amis, famille). Il devrait en résulter un programme d’usinage du texte assez important que l’auteur devra prendre en compte, suivant la pertinence des remarques et de leurs justifications. Vous êtes toujours maître de votre texte, mais quand plusieurs lecteurs qualifiés font émerger des remarques similaires, relatives à un souci, dites-vous bien que sur plusieurs milliers de lecteurs (espérons-le), ce souci ne passera absolument pas inaperçu.
Si la première phase d’un projet de roman semble être similaire à grand saut dans le vide, en espérant réussir à écrire une bonne histoire du début à la fin, dites-vous bien que la seconde phase, celle de la réécriture, est peut-être moins angoissante, mais elle est plus longue et très exigeante.
Vous relirez votre texte, peut-être jusqu’à ne plus en pouvoir, mais vous aurez le sentiment de le voir fonctionner avec la précision d’une horloge Suisse. Passe après passe, vous traquez et traitez les problèmes les uns après les autres (personnage par personnage, intrigue par intrigue, qualité des phrases (style, orthographe, grammaire, conjugaison, ponctuation…)). Vouloir traiter un ensemble trop important de problèmes en une seule relecture/réécriture c’est prendre le risque de mal réécrire.
Le rôle premier d’un éditeur est d’accompagner l’auteur dans cette phase délicate de la réécriture. Suivant les auteurs, l’éditeur aura plus ou moins de travail. C’est aussi pour cette raison qu’un auteur en herbe a intérêt de soigner son manuscrit avant de le proposer à un éditeur. L’éditeur sait tout de suite évaluer la quantité de travail de réécriture sur un manuscrit, et aussi si ce travail est possible, sans avoir à tout refaire en partant de zéro. C’est son job, et il le fait depuis des décennies parfois. L’éditeur devra convaincre toute la chaine du livre que le texte qu’il propose est bon, il doit avoir des garanties s’il veut conserver son autorité, avant de pouvoir publier.
L’éditeur n’écrit pas le livre à la place de l’auteur, il évalue la réécriture nécessaire pour le rendre publiable. Et c’est dans le cadre de cette évaluation que l’éditeur se pose plusieurs questions, dont les suivantes particulièrement dans le cas d’un nouvel auteur :
La liste des questions n’est évidemment pas exhaustive, mais cela permet de comprendre pourquoi il y a autant de refus de manuscrits, outre la qualité du livre en elle-même. Le livre c’est le cœur économique d’une maison d’édition. L’éditeur n’a pas le temps ni la vocation de former des bataillons d’auteurs qui ont le désir d’écrire. Il doit déjà assurer les publications régulières de ses auteurs avant de considérer les publications de nouveaux auteurs.
Une maison d’édition c’est souvent le travail d’une petite équipe qui ne compte pas ses heures et tente par tous les moyens de défendre les auteurs qu’elle publie, du moins les auteurs phares à minima. Imaginez-vous possible à présent que l’éditeur puisse répondre aux 5000 manuscrits reçus chaque année avec plusieurs pages de conseils de réécriture ? Évidemment non. Il n’en a ni le temps ni les moyens et surtout, ce n’est pas son travail. Vous écrivez, il publie.
Il est donc indispensable de traiter votre texte avec professionnalisme et sérieux avant de le proposer à un éditeur. Par ailleurs, dans le cadre de l’auto-édition, c’est justement grâce à un texte le plus professionnel possible que vous pouvez vous démarquer et peut-être attirer l’attention d’un éditeur. C’est même d’autant plus habile et possible dans l’auto-édition au vu des écarts de niveaux. Profitez de cet avantage.
Si vous adressez votre texte à un éditeur, c’est un peu comme viser une cible. Tâchez au moins d’être devant, c’est-à-dire de ne pas envoyer de la poésie à un éditeur polar. Soyez plus fin, visez l’éditeur, la personne en elle-même, en apprenant à la connaître à travers ce qu’elle publie comme texte, et ce qu’elle en défend dans la presse quand elle en parle. Un éditeur a besoin d’un coup de cœur. Offririez-vous un chat à quelqu’un qui a la phobie des chats ?
Ne faites jamais l’impasse sur les relectures réécritures. Pensez à l’exigence que vous avez en tant que lecteur quand vous dépensez 20 euros pour l’achat d’un livre. S’il s’agit d’un auteur en qui vous avez confiance, vous seriez déçu si le livre ne vous plait pas. Achèterez-vous le suivant ? Peut-être… peut-être pas… Et s’il s’agit d’un nouvel auteur, vous le rayez de la carte sans la moindre hésitation… pire encore pour cet auteur, vous le flinguez avec de mauvais commentaires (déjà qu’il en a peu, le vôtre pèsera). Même une note de 3 étoiles sur 5 ça fait mal, il suffit de peu pour désengager l’intérêt d’un livre. Les étoiles qui sauvent se jouent au moment des relectures réécritures. (Je suis persuadé que le coup de l’étoile ça vous parle et ça vous motive ;-). On utilise ce qu’on peut pour éviter les coups de fouet.).
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