Dans l’ombre du loup, de Olivier MERLE, polar d’ambiance, bien campé dans les codes du genre, où les promesses sont honorées. Le récit prend le temps d’installer son intrigue sur les premiers chapitres, puis surprend par sa montée en puissance. L’enquêteur et son entourage sont truculents, fruit d’une construction solide. Dans l’ombre du loup, c’est une affaire glaçante qui prend racine en vous au fil des pages.
À Rennes, l’officier de police Hubert Grimm affronte une affaire obsédante : un notable, M. Kerdegat, personnage désagréable et méprisant, reçoit coups de téléphone et lettres anonymes. Il y a aussi cet homme en scooter qui semble traquer les moindres faits et gestes du chef d’entreprise.
Jusqu’au jour où l’employée de maison des Kerdegat tombe, devant la demeure familiale, sur un corps découpé en morceaux. La tête du cadavre est introuvable…
Cette fois l’enquête prend un tour terrifiant. Hubert Grimm découvre les ramifications de ce qui n’était, au départ, qu’une sale histoire de corbeau : un club sadomasochiste, des messages codés, des mises en scènes morbides. Et une famille décimée.
Parfois, une seule affaire peut terrifier une ville entière.
Depuis plusieurs années, je ressentais une très forte envie de tenter cette nouvelle aventure. Jamais je ne me suis senti enfermé dans un genre et, si le roman historique a sans doute été celui que j’ai le plus pratiqué, j’avais déjà écrit aussi un roman d’anticipation, un roman préhistorique et un roman d’amour. À mon sens, le romancier aime surtout raconter des histoires, c’est un conteur de l’écrit, et aucun genre ne devrait a priori le rebuter. Or, la liberté offerte par le roman policier (par rapport au roman historique) m’a moi-même bluffé et à tout point de vue. J’y ai pris un plaisir immense et la construction de l’intrigue, qui ne se fait pas en un jour… et évolue parfois au cours du roman, m’a passionnée. J’ai découvert que mon imagination et la part rationnelle de mon esprit (je suis un scientifique) se sont accordées sans aucune difficulté et se sont même stimulées l’une l’autre. L’écriture de ce roman fut un moment de pur bonheur.
Au début du roman, Hubert Grimm n’est pas au mieux de sa forme. Muté à Rennes pour indiscipline, en pleine débâcle affective, il est atteint de climato-dépression, un symptôme récent appelé aussi éco-anxiété affectant les personnes qui se désespèrent et se sentent impuissantes face à la destruction de la planète. Le Dr Lipsky, une psychiatre assez singulière elle-aussi, tente de Je sortir de cette ornière. Elle a fort à faire avec un patient bourré de contradictions et qui, de plus, bien que n’ayant pas d’enfant, est tout autant tourmenté par des problèmes de paternité, lesquels s’avéreront bientôt cruciaux. L’enquête complexe qui lui est confiée dès son arrivée à Rennes est à coup sûr la meilleure thérapie, et il va se jeter dedans à corps perdu, même si, en dernier ressort, ce sont les décisions qu’il aura à prendre dans sa vie affective chaotique qui lui rendront sa sérénité.
M. Kerdegat est un notable arrogant et sûr de lui, riche, bien intégré, connu et respecté, détenteur de l’ordre du Mérite. Pourtant, dès qu’on creuse un peu, ses affaires, son couple, sa maîtresse et ses relations nourrissent les soupçons. Et les lettres anonymes qu’il reçoit, leur contenu surtout, ne font qu’attiser la méfiance. Derrière sa respectabilité, l’homme cache trop de choses. Le lecteur le découvrira.
Même si je vis en Auvergne (une région magnifique) depuis plus de vingt-cinq ans, je suis né à Rennes et je ne n’ai quitté cette ville définitivement qu’à 38 ans, peu après un séjour de deux ans aux États-Unis. Les lieux de l’enfance et de la jeunesse marquent plus que tout. Curieusement, alors que je n’y habiterai plus jamais, elle reste « ma ville ».
Il ne m’est pas particulièrement cher, mais il est vrai qu’il apparaissait déjà dans Libre d’aimer (X0 Éditions, 2019).
Chabrol est effectivement le maître pour montrer, derrière la façade respectable, l’envers du décor et les turpitudes de ce milieu. Le couple Kerdegat pourrait sortir tout droit d’un de ses films.
Cependant, dans ce roman, d’autres milieux sont aussi présents. Koprotkieff, par exemple, vit comme un Français ordinaire, même si son métier est très inhabituel. Quant à Sabine Mourot, qualifié par l’un des personnages de « grande prêtresse » ou de « maniaque du fouet », elle est la reine de la nuit et des soirées underground.
Des recherches de deux sortes. La première par Internet en effectuant des recherches ciblées sur les sites les mieux documentés et les plus fiables, toujours avec méfiance cependant, croisant les informations et les vérifiant sans cesse dans le souci d’être le plus exact possible. La seconde fut plus ludique. J’ai lu de très nombreux romans policiers en notant les procédures judiciaires et policières. Et en tentant ensuite de les authentifier sur les sites officiels de la police ou de la justice. Ceci dit, quand on ne connaît pas un milieu et ses pratiques, personne n’est à l’abri d’une erreur…
J’ai toujours aimé écrire. Il faut dire que grâce à mon père, Robert Merle, j’ai côtoyé très jeune l’univers d’un romancier.
Je ne peux nier le fort impact de sa passion sur mes propres aspirations. Mais ma vie professionnelle — passionnante par ailleurs — m’a obligé à mettre ce plaisir d’écrire entre parenthèses. Il est donc revenu tardivement, peu à peu, inexorablement. Ce n’est qu’en 2009 que j’ai véritablement démarré ce que je considère maintenant, avec le recul, comme une seconde carrière aux antipodes de mon métier que j’exerce toujours.
Par ailleurs, J’ai toujours un livre en cours de lecture. Au fond, je recherche dans les romans que je lis la même chose que dans ceux que j’écris : l’immersion dans un autre univers qui donne l’illusion d’exister par lui-même. En ce sens, écrire un roman me fait éprouver, parfois très intensément, des émotions propres à des hommes et à des femmes au destin singulier. C’est une manière d’expérimenter, abstraitement mais d’une manière très sensible, la vie d’êtres humains à la personnalité remarquable. Cela peut aller assez loin. Par exemple, en écrivant Libre d’aimer qui raconte une histoire d’amour entre deux femmes, je me suis souvent senti l’une et l’autre. Expérience improbable pour un homme hétérosexuel…
Mes projets sont toujours secrets et personne ne les connaît. Mais j’avoue que je me suis attaché à Hubert Grimm. Je n’exclus pas, si les lecteurs l’aiment aussi, de lui donner vie une seconde fois.
Olivier Merle est né en 1956 à Rennes. Universitaire et romancier, il est l’auteur, aux Éditions XO, de Libre d’aimer. En 2013 il a obtenu le prix Charles-Exbrayat.
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Top 🙏😃 J"aime beaucoup cette chronique, Monsieur Delage